mardi 8 novembre 2022

Jean Thouard, le Président de notre Bureau des Élèves 1966 nous a quittés

Notre camarade Jean Thouard s’est éteint le 21 août dernier.

Gérard Pogorel nous a transmis son témoignage : 

« Jean Thouard avait une façon de pencher la tête vers son interlocuteur, bienveillant, pas vraiment sceptique, mais vigilant en quelque sorte. Une attitude physique en partie liée à la polio qu’il avait eu enfant.

Personnalité de la promotion 66, il en a été le président du bureau des élèves. Ce fut une élection teintée, de façon inhabituelle pour HEC, de politique. On sentait des prémices de 68, même si de façon sous-jacente, la tradition de munificence des campagnes électorales restait néanmoins centrale. Les candidats se devaient de démontrer leur capacité à choyer les élèves de dons, boissons, trinkets et spectacles, une forme de démonstration de pouvoir dans l'esprit du potlatch de Boas et Mauss.
Le bureau du candidat Thouard s’opposait à celui de Buretel de Chassey. Ce dernier, très belle personnalité lui aussi, nous a quitté il y a quelques années déjà, ayant consacré la dernière partie de sa vie à ses talents d’auteur compositeur interprète.
Les débats ne manquèrent pas d’âpreté, et je dois dire, la justesse des arguments n’était pas toujours au rendez-vous, sans que les têtes de liste en soient responsables.

Les bureaux candidats s’employaient à une surenchère dans le grandiose. Je ne sais plus si c’était dans cette campagne que fut organisé à l’école, devant un amphi bondé, un spectacle de Fernand Raynaud, grand comique humaniste, qui glissa HEC dans l’un de ses sketches, le fameux « Ch'suis qu’un pauv’ paysan ». Il y eu aussi une soirée chanteuse engagée (Colette Magny). Pour le jour de l’élection, l’équipe Thouard nous réservait une apothéose : Jean arrivant dans la cour de l’école par le passage du boulevard Malesherbes, devait faire son entrée juché sur un éléphant qui avait été réservé auprès d’un cirque. Le décès accidentel d’un camarade de la promotion entraîna l’annulation des aspects ostentatoires de la campagne.

Au tournant des années 60, les édiles de la CCIP furent désireux d’un changement d’esprit, de rompre avec le folklore ancien et de substituer à l’esprit épice et fistici un nouvel esprit « business school », illustré par un lapsus que je ne saurais répéter ici. Ils prirent la décision de ne pas transférer la promo 66 sur le campus nouvellement établi à Jouy et de lui faire terminer la scolarité boulevard Malesherbes. 

Se trouver ainsi isolés attrista notre dernière année d’école.

Jean, guidé par sa passion de la pédagogie et son esprit d’entreprise, choisit une carrière de dirigeant d’écoles de commerce, Sa passion de la lecture cependant, en particulier de la philosophie politique, ne le quitta pas. Le drame qu’il vécut en 1992 est indicible. Il se consacra à l’éducation de ses fils, à qui il transmit son aspiration à la justice sociale. Nous fûmes émus de retrouver en eux ses traits.

A eux, à sa famille, à sa sœur, à ses collègues et amis, nous présentons nos condoléances. »

Gérard POGOREL